Vivre comme on danse
Aurore aime les sushis.
Elle les mange avec beaucoup de sel.
Ce qui est mauvais pour son rythme cardiaque. Elle le sait.
Aurore aime la course à pied.
Tous les samedis matin, elle court.
Un jour,
elle était adolescente,
son père lui a dit : “Viens courir avec moi.”
Elle l’a suivi, puis dépassé.
Aurore aime le cinéma.
Plutôt les films et les acteurs américains ;
mais quelques cinéastes français trouvent grâce à ses yeux.
Quand elle ne travaillait pas,
elle voyait trois films par jour.
Elle recommencera.
Aurore aime les lieux tendance
et les musiciens branchés.
A l’entrée, les physios la reconnaissent. Au bar, les DJ’s lui claquent la bise. Parfois, soirée privée,
son nom est sur toutes les lèvres.
Aurore aime les étés en Corse.
Vivre au bord de la mer,
dans une jolie maison,
avec juste un petit chemin à descendre. Ou alors partir dans l’arrière-pays
et dire à ses amis, après un dernier verre, “Je monte au village”.
Aurore aime les voitures de sport. Décapotable, cheveux au vent, elle s’abandonne.
Mais à la place du mort,
elle préfère celle du pilote.
Elle a un petit côté “Françoise Sagan”.
Aurore aime l’alcool
et le sentiment d’égarement qu’il procure. Et si le champagne,
un brut réserve,
a ses faveurs,
elle ne repousse pas,
à l’occasion,
un petit rouge au comptoir.
Elle a une bonne descente.
Aurore aime les hommes, qui le lui rendent bien.
Baiser dans le cou, caresse sur la joue,
elle les veut juste un peu virils, juste un peu sensibles.
— Alors, trop sensible pour elle, de loin,
je la regarde vivre, comme on danse.
Francis Gavelle